Culture
- Publié le 14 février 2025

Quais du Polar 2025 : l'interview croisée !

Dans le cadre d'un partenariat littéraire entre Quais du Polar et les éditions Points, Contrebandiers est le fruit de la collaboration entre deux auteurs, la Française Michèle Pedinielli et l’Italien Valerio Varesi. Ils ont uni leurs voix et leur talent pour écrire un polar où la frontière franco-italienne joue un rôle important…

Contenu

Comment vous définissez-vous en 3 mots ?
Michèle Pedinielli
: Beaucoup de doutes
Valerio Varesi : Indépendant, têtu, inventif.

Qu'est-ce qui vous a amené vers le roman noir ?
MP : Ils constituent l’essentiel de mes lectures depuis toujours.  Ils parlent de la violence collective qui nous est imposée à tous (enfin aux 99% d’en bas). J’ai l’impression que ce sont les derniers romans sociaux.
VV : La capacité du roman noir de décrypter les maux de l’homme et les dysfonctionnements de la société dans laquelle nous vivons.

Que symbolise la notion de "frontière" pour vous ?
MP : Une ligne administrative qui tranche dans le vif, dans le vivant. Elle n’est jamais aussi intéressante que quand elle est poreuse. 
VV : Rien de physique, ni quelque chose qui évoque les douanes. La frontière marque une différence et, pour moi, les différences se situent au niveau des idées avec lesquelles on aborde le monde et notre rapport aux autres. C’est une géographie mentale. J’érige une frontière contre l’intolérance, l’autoritarisme et l’abus de pouvoir. Je crois que nous devons tous l’ériger. Une frontière idéale, très différente de celles faites de murs qui surgissent là où l’autoritarisme prévaut.

La frontière entre l'Italie et la France est-elle vraiment réelle ?
MP : Oui, nous sommes deux pays séparés. La frontière s’est même élargie de dizaines de kilomètres (ce n’est pas une simple « ligne ») pour pouvoir arrêter les clandestins même lorsqu’ils l’ont franchie et sont arrivés en France.  Aujourd’hui les Italiens n’ont plus de problème pour venir chez nous mais à l’époque de ma grand-mère c’était très différent : elle est arrivée par les mêmes chemins empruntés aujourd’hui par les migrants africains, avec la même angoisse j’imagine.
VV : Je pense que non, et j’espère que ce ne sera jamais le cas. L’Italie et la France sont unies dans l’Europe qui, je l’espère, naîtra bientôt comme un complexe politique et culturel unique. Malheureusement, des restes de nationalisme subsistent, comme dans le cas de la gestion des migrants et de certains jeux économiques, mais j'espère qu'ils seront surmontés avec le temps. 

Comment fait-on pour écrire un roman à 4 mains ?
MP : On se fait mutuellement confiance. J’adore les livres de Valerio depuis « Le fleuve des brumes » alors, lorsque le premier chapitre de Contrebandiers est arrivé, j’ai été enthousiaste tout de suite : son idée d’histoire était parfaite et j’ai pu embrayer le deuxième chapitre immédiatement. On est allés très vite en se téléphonant une fois pour régler les grandes lignes et en s’envoyant ensuite des messages pour régler  les détails.  
VV : Pour moi, c’était la première fois, mais l’expérience a été concluante. Je pense qu’il est très important d’être d’accord sur ce que l’on veut raconter et de “sentir” l’histoire que l’on va raconter. Deuxièmement, il est bon d'uniformiser le style afin de ne pas montrer trop de différences entre les deux parties. Enfin, une compatibilité entre les auteurs est nécessaire, tant du point de vue du caractère que d'un point de vue théorique plus délicat sur le sens que l'on donne à la littérature. Et avec Michèle, j'ai trouvé une partenaire idéale.

Quel est votre livre de chevet en ce moment ?
MP : Black Magic de Davide Ferrario (encore un Italien !)
VV : Elias Canetti : Il libro contro la morte (Le livre contre la mort).